Le bloc-notes magique (wunderblock) de Freud

La Note sur le « bloc-notes magique » est un petit texte fort intéressant de Freud, écrit en 1925 (page 129 de « Huits études sur la mémoire et ses troubles« , Sigmund Freud, Ed. Gallimard, Coll. Connaissance de l’inconscient).

Freud commence par donner un crédit significatif aux supports de mémoire (hypomnemata ou extended mind chez les Américains) en rattachant explicitement les notes manuscrites au dispositif mnésique :

« Le support qui conserve ces notes, tablette à écrire ou feuille de papier, est alors en quelque sorte un morceau matérialisé de l’appareil mnésique, qu’habituellement je porte en moi de façon invisible. » p.133. (XIV,3)

Ce faisant, souligne Freud, le souvenir a été fixé et peut être reproduit à volonté, sans avoir subi les affres de la mémoire. Ce procédé d’écriture mnésique est ensuite lui-même distingué en deux procédés selon le support d’écriture qui est choisi :

  • si c’est un papier, j’obtiens une « trace mnésique durable« . Mais qui a les spécificités suivantes : tout d’abord, une fois la feuille remplie, il faut en utiliser une autre (le support ne peut contenir qu’une quantité limitée de traces), ensuite, si je ne veux plus garder la trace d’une note, je dois pouvoir l’effacer, ce que ne peut pas faire le papier selon Freud.
  • si c’est une ardoise, j’ai un support d’une capacité potentiellement illimitée : je peux effacer les traces sans jeter aux rebuts le support lui-même. L’inconvénient étant que je ne peux garder de trace durablement.

Ce qui permet à Freud de faire le constat suivant :

« Capacité illimitée de réception et conservation de traces durables semblent donc s’exclure mutuellement pour ce qui est des dispositifs qui servent de substituts à notre mémoire ; il faut, soit renouveler le support, soit supprimer les notes. » p. 134 (XIV, 4)

Il souligne ensuite que, si la plupart des prothèses techniques qui augmentent notre perception (vue, audition) sont des dispositifs techniques qui imitent l’organe sensoriel, force est de constater que les dispositifs techniques qui augmentent notre mémoire sont particulièrement défectueux car « notre appareil psychique sait justement réaliser ce qu’eux ne peuvent faire ». more »

Biodiverstity (for Business)

Le World Resources Institute (WRI) est une organisation qui se présente de la manière suivante :

WRI is an environmental think tank that goes beyond research to find practical ways to protect the earth and improve people’s lives.

C’est très noble.
Mais une autre manière de voir, s’y l’on croit les journalistes Agnès Bertrand et Françoise Degert, est celle qui va suivre. Après avoir écouté leur entretien dans l’émission Terre à terre du 16 Octobre, voici à la fois ce que j’en ai compris et comment je l’interprète.

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Prolétarisation paysanne et terracide

Dominique Guillet, fondateur de Kokopelli, association qui produit et distribue des semances potagères bio de variétés anciennes, fait l’ouverture du documentaire « Solutions locales pour un désordre global » de Coline Serreau. Il va poser ce qui constitue les prémices de la thèse qui est défendue par la réalisatrice :

« Qu’est-ce que c’est la première guerre mondiale en fait ? C’est l’éradication de la paysannerie franco-germanique qui se fait massacrer au front, des millions de paysans sont morts ! »

Dominique Guillet

Puis il poursuit :

« Et donc, cette entreprise de dé-paysannerie a été parachevée par le deuxième guerre mondiale. Et viens se greffer, par dessus tout cela, la synthèse de l’amoniaque qui permet de faire des bombes et qui après permet de faire des fetilisants de synthèse. Ensuite, l’invention du gaz moutarde qui va donner quoi ? Eh bien tous les insecticides, qui sont des gaz de combats. Puis, avec le pla, Marshall de 1947, les États Unis arrivent avec leur tracteurs qui sont la suite logique des tanks.
Donc, en fait, l’agriculture occidentale est une agriculture de guerre. »

Ce propos est ensuite souligné par celui d’Ana Primavesi, ingénieur agronome, docteur, professeur en gestion des sols de l’université de Santa Maria: more »

24 Oct 2010, 11:05
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Derrida en embuscade

Quand il a commencé à écrire et à publier son œuvre, il est arrivé à Derrida de se confronter aux textes de ses contemporains : Ricoeur, Foucault, Levinas, Lévi-Strauss, etc.

Or Derrida a un angle d’attaque, dans son analyse critique, qui est redoutable : c’est sa réflexion sur l’écriture. Réflexion qui fait de lui un lecteur et un commentateur qui ne laisse pour ainsi dire rien passer. Il peut très bien s’engouffrer dans quelques lignes d’un texte à partir desquelles il va détricoter toutes les thèses développées par l’auteur.

C’est d’ailleurs ainsi qu’il commence à procéder avec son commentaire de l’Introduction de la géométrie de Husserl, où il s’attache à une brève allusion à l’écriture dans ce texte tardif de Husserl, à partir de laquelle il va encercler l’œuvre comme s’il arrivait à faire émerger son inconscient textuel. more »

Ce n’est pas qu’une histoire de données

Les questions relatives à l’ouverture des données sont importantes. Pourtant ce n’est pas là le plus important car, si c’est nécessaire, ce n’est peut-être pas suffisant.

Il faut souligner que l’enjeu, au travers de l’ouverture des données, qu’elles soient d’origine publique (institutions et puissance publique) ou privée (organisations et entreprises), l’enjeu, disais-je, n’est pas tant d’exposer ses données mais plutôt son métier, parfois même son coeur d’activité.

Exposer ses données sans saisir que l’enjeu est d’exposer son activité, c’est ne pas comprendre qu’il s’agit de passer d’une logique dissociée à une logique associée et donc d’embrasser les opportunités des technologies relationnelles. On peut, par exemple, exposer ses données et continuer à travailler comme si de rien n’était, comme avant. Cela serait fort dommage, et je suis convaincu qu’il faut un peu plus que çà. more »

Apprendre Haskell

Haskell est un langage de programmation fonctionnelle. Un style de programmation où l’on utilise des fonctions plutôt que des objets, contrairement au paradigme de la programmation orientée objet.

Je ne vais pas refaire ici la liste des caractéristiques de la programmation fonctionnelle et de Haskell en particulier. Le souhaite juste indiquer rapidement quels sont les enjeux et quelles sont les ressources que l’on peut utiliser pour s’y initier.

Pourquoi Haskell ? Parmi les nombreux langages de programmation fonctionnelle de grande valeur (Scheme, OCaml,F#, Erlang, etc), Haskell a un statut particulier car c’est le plus « pur » (il y a aussi Clean, mais plus confidentiel), c’est à dire celui qui vous contraindra le plus à embrasser le paradigme de la programmation fonctionnelle.
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Laissez tomber vos claviers et passez au crayon à papier

Qu’est ce qui peut bien être encore plus hype que le iPad ? Un crayon à papier.

Ah mais attention, pas n’importe quel crayon à papier. Pas de ces crayons à papier que nous avions à l’école.

Non, il s’agit d’un crayon à papier qui est devenu mythique, le Blackwing 602 produit par Eberhard Faber : bien que la production de ce modèle ait été stoppée aux US en 1998, les rares exemplaires  existant continuaient à se vendre sur eBay pour plusieurs dizaines de dollars (!).

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Irresponsabilité et violation

Quand on voit comment les partis politiques appréhendent les potentialités des technologies relationnelles on est en droit de s’attendre à tout – et au pire – dans le cadre de la campagne pour la prochaine élection présidentielle.

Par où l’on voit que les technologies relationnelles peuvent très bien être utilisées sans aucune technique relationnelle (une utilisation sans vergogne). On peut utiliser des technologies relationnelles pour détruire des liens et des relations.

Il y a une violation, pour reprendre le terme de Frédéric Worms ; c’est quand une relation est rompue que ce que portait la relation apparaît comme un manque ou une tragédie.

Confronté à de tels détournements et violations des techniques relationnelles (le savoir-vivre et le savoir être-ensemble), les partis politiques pourront toujours dire qu’ils n’étaient pas au courant, que le militant a agi seul, un peu comme le fait la Société Générale avec Kiervel, ou actuellement les ministres qui passent leur temps à dire qu’ils ne savaient pas ou qu’ils n’étaient pas au courant (des agissements, des circulaires, des fichiers illégaux, etc.).

Or on a les employés et les militants qu’on mérite. Et être un responsable, que ce soit en entreprise ou en politique, cela veut d’abord dire être responsable.

Et pour l’instant, c’est le parti dont les responsables fustigent le plus le web et ses dérives qui y adopte les pratiques les plus détestables.

On jugera les prétendants et leur parti sur leur discours mais aussi tout autant sur leurs pratiques : auront-ils des techniques relationnelles dans leur stratégie relative aux technologies relationnelles ou bien des techniques de violation des relations et des liens ?

Le « lectographe » pour formaliser la lecture d’une oeuvre

Quand on lit un texte, si celui-ci est un cours, un essai, bref si c’est un texte que l’on lit pour apprendre, on est confronté à des moments de compréhension qui sont divers. Je me suis demandé si l’on pouvait essayer de formaliser cette expérience de lecture en utilisant un formalisme graphique.

On remarquera toutefois :

  • que cela a du sens surtout pour les livres qui nécessitent plusieurs lectures ou qui relève de la démonstration et de la pédagogie ;
  • que cela n’est pas forcément évident à utiliser pour une oeuvre papier, mais que cela pourrait avoir une importance déterminante comme outil de travail et d’appréhension avec les textes numériques.

Quels sont les états qui sont intéressants à positionner sur chacune des pages de l’œuvre ? Essayons d’en donner une première liste :

  • Compréhension, qui indique que l’on arrive à suivre et à comprendre l’auteur. Bien sûr on peut se tromper, ne comprendre que partiellement, voire même mécomprendre. Ce sont des variations qui pourront être introduites par la suite ;
  • Adhésion (l’Accord et le Désaccord). Quand on n’est en phase avec les propos de l’auteur, ou bien quand on estime qu’il y a des erreurs. Là aussi, il peut avoir des variations si l’on considère que l’on a pas d’avis tranché, voire que l’on doute simplement ;
  • etc. il y en a sûrement d’autres.

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Les technologies relationnelles dans les systèmes d’information

Après l’informatique embarquée et l’informatique de gestion, tend à s’en rajouter une troisième informatique qui est l’informatique relationnelle. Celle-ci ne repose plus sur des technologies de gestion mais sur des technologies relationnelles.

Pour expliciter ce qui se passe, il faut d’abord dire que ces deux informatiques, de gestion et relationnelle, malgré les différences que je vais souligner, ne s’opposent pas systématiquement. Ainsi, une application peut relever à la fois d’une informatique de gestion et d’une informatique relationnelle. more »