L’acédie, un symptôme de l’amour chrétien

Lucrèce Luciani-Zidane était l’invitée de Frédéric Lenoir dans son émission Les racines du ciel du 12 Avril 2011. Je retranscris très librement ci-après les propos de l’émission qui était axée sur son livre : L’Acédie, le vice de forme du christianisme. De Saint Paul à Lacan.

Le démon de l’acédie

L’étymologie du terme acédie, telle qu’on peut la lire dans wikipedia, est la suivante :

Étymologiquement, ἀϰήδεια (prononcer « akêdéia ») signifie en Grec ancien  : négligence, indifférence. Ce nom appartient à la famille du verbe άκηδέω (prononcer « akêdéo »), qui veut dire « ne pas prendre soin de ». On a l’image de quelqu’un qui néglige de prendre soin de lui-même, et finit par se désintéresser de tout.

Pour une version plus phénoménologique de l’acédie, on se rapportera au texte récent de Gaëlle Jeanmart, Acédie et conscience intime du temps, tout aussi intéressant.

L’acédie est un concept de la théologie chrétienne que l’on présente généralement sous le vocable étonnant d’ “ennui spirituel”.

Pour les premiers anachorètes, ces premiers ermites chrétiens, le pire des dangers était l’acédie, présentée comme une forme d’ennui, bien que le terme d’ennui n’existait pas encore car il n’apparaît qu’au 12°siècle. L’acédie est assimilée à un “démon de midi” dont l’effigie le représente avec une massue qui peut assommer le moine soit l’étourdir d’un sommeil dont il peut ne pas se réveiller, soit le faire se mettre à s’enfuit et à courir comme un fou dans le désert.

Un démon armé d'une massue enfourne les damnés dans la gueule du Léviathan (Conques)

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Sens et enjeux des modèles de stockage et d’accès aux données

C’est typiquement le genre d’article qui nécessite des corrections, des remarques et peut-être un débat. Alors n’hésitez pas.

Code et data

Pas de code sans données, car le but d’un code est de tourner et de produire des résultats et, pour ce faire, le code doit “manger” des données.

On peut voir le code dans sa forme la plus abstraite comme un algorithme dont le rôle serait de produire des preuves. Mais on peut aussi voir le code comme un algorithme qui ne fait pas simplement que valider et prouver mais également qui produit des changements d’états et des évènements qui, au sens littéral du terme, changent le monde.

On a ici un parallèle avec les “speech acts” de Searle et Austin dont Henry Story avait parlé dans son intervention au MeetUp Semantic Web de Février 2011.

Quiconque écrit un programme s’attend en effet à “changer le monde”, ne serait-ce que pour écrire “Hello World” sur un terminal. Changer le monde avec des algorithmes et du code, Microsoft, Google,  Facebook et d’autres l’on fait, et l’ensemble des développements en Open Source peut-être plus encore.

Pas de code sans données donc.  Or ces données sont stockées dans des supports de mémoires différents selon qu’elles sont en mémoire vive, sur un système de fichier, ou dans une base de donnée. Et chaque support de mémoire utilise un modèle de données qui n’est pas forcément le même. Ce qui nous ramène à la difficile collaboration entre les développeurs et les gestionnaires de base de données.

Si les développeurs et les administrateurs de base de données doivent collaborer, la réalité est parfois toute autre : les développeurs ne comprennent pas toujours le SQL et les RDB (bases de données relationnelles), et les DBA (administrateurs de base de données) ne voient les développeurs que comme de dangereux cowboys qui veulent massacrer l’intégrité de leur données (“mon précieux …”).

Le DBA

Le développeur

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Accéder à la pensée chinoise


Qui n’a pas eu entre les mains ou dans sa bibliothèque un ouvrage de François Jullien ? N’était-ce pas pour aller respirer une toute autre culture, aussi importante que la pensée grecque et occidentale ? Chercher l’Autre, l’altérité radicale de notre pensée dans la pensée chinoise, n’est-ce-pas ce que nous sert François Jullien sous forme de tourisme noétique ?

En ce qui me concerne, ce qui m’attirait chez Jullien fut aussi ce qui m’en éloignait, c’était que j’y voyais un discours Heideggerien. Cet homme utilisait la pensée et la poésie Heideggerienne pour appréhender la pensée chinoise. Il faut dire que c’était bien pratique pour moi : connaissant un peu Heidegger, je devenais un spécialiste de la pensée chinoise grâce aux travaux de François Jullien : quelle formidable économie !

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10 Avr 2011, 11:11
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Shots that changed my life (33)

Somewhere, 2010, USA, de Sofia Coppola.

Quel titre que « Somewhere » pour ce film de Sofia Coppola quand on sait que son cinéma cherche à filmer le vide et le flottement de l’âme. Ici le « somewhere » est « quelque part », c’est-à-dire « on ne sait pas vraiment où ».

Sofia Coppola a un sens de la métaphore exceptionnel, comme dans cette scène clé où le personnage principal, un acteur célèbre, qui commence à sentir l’angoisse du vide de son existence, va se faire faire un masque pour un tournage. Il devra ainsi rester trois quart d’heure avec une sorte de plâtre recouvert sur le visage, à l’exception des narines pour respirer.

Le voilà comme emmuré vivant, sans pouvoir entendre, voir, ni parler ; juste respirer par les narines. Faire face à son propre vide, quelle torture et qu’elle angoisse pour, enfin, ré-ouvrir les yeux et se découvrir grimé en veillard, comme si la vie avait défilé en un claquement de doigt.

La bande son est exceptionnelle jusque dans les détails, le travail de sur-expositon de l’image fait merveille et rajoute à la sensation de flottement. Une grande leçon de cinéma et d’art.

9 Avr 2011, 7:31
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Positivité de l’oubli

Toujours la mémoire est valorisée et mise en avant dans son économie avec l’oubli. Ses techniques et ses ruses sont merveilleuses et parfois même mystérieuses. L’oubli, quant à lui, reste dans l’ombre, il a la figure du négatif et de la privation.

Photo Bertrand Marenger

La mémoire arrache à l’oubli qui, lui, est effacement. Cet arrachement est une technique, et la mémoire est de facto une mnémotechnique.

Pourtant, il ne vient pas à l’idée, sauf précisément chez Freud avec le concept de refoulement, de parler de techniques d’oubli comme on parle de techniques de mémoire.

Qu’est ce que cela veut dire « oublier » ? more »

9 Avr 2011, 2:34
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Écologie du Kung-fu

Peu de film d’arts martiaux sont autant associés à la comédie et au divertissement que le kung-fu (kung-fu panda, crazy kung-fu, kill bill, l’immense filmographie de Jacky Chan, etc.).

La raison en est, je crois, que le kung-fu est non seulement un art martial, mais aussi une écologie du combat. J’emploi ici écologie au sens strict du terme, c’est à dire comme rapport à un milieu et un environnement. Celui qui utilise les techniques du kung-fu fait avec le milieu et l’environnement dans lequel le combat a lieu. Une chaise, une échelle, puis tout le mobilier est convoqué dans le combat, que ce soit pour attaquer ou pour se défendre. more »