Des bibliothèques
Pourquoi des bibliothèques dans le futur s’il y a un accès universel via des supports numériques ?
Plus on avance dans un monde de supports numériques, plus les bibliothèques sont nécessaires. Cette nécessité s’exprime dans les trois grands rôles que devront tenir les bibliothèques dans l’avenir :
1. La signification des textes est dépendante de la forme de leur inscription et leur communication.
Il n’y a pas au sens strict d’équivalence entre un texte de Platon sur un rouleau de papyrus et le même texte sur support numérique. Parler d’équivalence supposerait que l’on ne retienne de l’oeuvre que son contenu. Réduite les textes à leur contenu c’est les réduire à leur contenu sémantique. Et l’on sait aujourd’hui que l’on ne peut faire abstraction des formes matérielles et des modes d’appropriation des textes.
En ce sens, la bibliothèque est le lieu de la conservation des discours dans leurs formes successives. L’explicitation de la culture écrite dans ses différents supports relève pleinement du rôle de la bibliothèque. (Le support numérique permet des traitements que ne permettent pas les supports physiques traditionnels.)
2. De plus en plus de jeunes ont accès à l’écriture directement via le monde électronique, et perdent conscience des autres formes de cultures écrites, comme le livre imprimé. Avec les supports numériques, il y nécessité de formation. Il y a une technique particulière qui s’y déploie.
A ce titre, le deuxième rôle de la bibliothèque est de former à cette nouvelle technicité requise par les supports numériques.
Dans la textualité électronique, on ne retrouve plus cette hiérarchisation et cette mise en relief des corpus qui existe dans les supports imprimés. La notion de référence se dilue et se transforme dans le support électronique.
L’immédiateté de la disponibilité du texte électronique détourne les règles de hiérarchisation et le filtrage qui existent dans le support papier. Il y a oblitération de l’ordre des discours dans l’accès électronique au texte. C’est donc un des rôles de la bibliothèque que de palier à cette désorientation que recent celui qui fait ses premiers pas sur Internet. La bibliothèque doit mettre en place un appareil critique de mise en place d’une autorité, d’une classification et d’une hiérarchisation des textes électroniques.
3. Troisième rôle de la bibliothèque, être un lieu de la parole échangé autour des textes. Un lieu qui brise l’isolement et la solitude du lecteur face au texte, qu’il soit papier ou numérique. On citera, à titre d’exemple, les rencontres avec les auteurs, les conférences, les ateliers et de manière générale l’ensemble des événements. (Ce qui implique d’ailleurs la mise ne place d’une programmation).
Ces idées sont exprimées par Roger Chartier dans un entretien video consultable en ligne. Un grand merci à Olivier Ertzscheid pour m’avoir fait re-découvrir le site des archives audiovisuelles en sciences humaines et sociales
Vous oubliez un rôle classique des bibliothèques, c’est celle d’archives.
Quand on voit avec quelle vitesse les archives informatiques disparaisse (format obsolètes, bande magnétique démagnétisés, CD-ROMs oxydés, etc…) la bibliothèque, peut-être dans une forme numérique – la bibliothèque du congrès fait un miroir des fichiers de la BNF et pareil de l’autre coté – en tant que institution de l’archivage a toute sa place. Compter sur Google ou des sociétés privés pour bien gérer leurs archives n’est pas toujours une bonne idée, voir la qualité des archives de l’INA par rapport à celles des chaînes privées depuis la privatisation.
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