Le Système d’Information des SSII
Je ne pouvais pas commencer cette note sans évoquer ce proverbe qui devient un topique quand on parle du système d’information des SSII :
« Ce sont les cordonniers qui sont les plus mal chaussés ».
De fait, j’ai rarement eu des expériences utilisateur
mémorables en utilisant le SI d’un cabinet de conseil ou d’une SSII.
J’ai le souvenir d’une discussion entre un client et le directeur d’une SSII qui venait lui vendre un progiciel. Dans la discussion, le client demanda si la SSII avait choisi ce progiciel pour son SI, puisqu’il était « si formidable ».
Le directeur de la SSII ne savait que répondre, car comment lui dire que la solution utilisée en interne était un classeur excel truffé de macros qui marchait une fois sur deux ?
Avec diplomatie, notre directeur de SSII répondit donc que c’était confidentiel.
« Ah bon, répondit le client, et bien moi aussi je vous annonce que le choix de mon progiciel est confidentiel. En conséquence de quoi je souhaite mettre un terme à notre discussion ».
Au delà des choix faits pour le SI des SSII, quelque chose me dit que cette histoire est loin d’être unique. Car, d’une manière générale, le top management d’une SSII d’une certaine taille est généralement particulièrement mauvais dans le contact clientèle. Heureusement, ces dirigeants ont d’autres qualités.
Toujours est-il que, si vous êtes en C&SI (Consulting et System Integrator), amenez votre PDG voir un client et vous êtes sûr de prendre une claque en clientèle.
Moi, je vous avoue que j’adore çà. J’accepterai presque de perdre un projet rien que pour assister à la réunion.
Si le théâtre a le vaudeville, les SSII ont leur réunion client avec leur DG, et c’est un genre à part entière de la comédie humaine qui a un certain charme.
Mais là je m’égare, revenons au SI des SSII.
Ma thèse est que ce type d’entreprise à tout intérêt à faire le choix qu’a fait SUN en décidant de ne plus avoir de SI « on premises », dans ses locaux. Les consultants et les ingénieurs sont en permanence chez leurs clients, en déplacement ou sur un plateau en mode projet. Or, les échanges avec les clients sont très faiblement supportés par le SI des SSII.
Un SI « on the cloud », adapté au mode projet et proposant un environnement participatif avec le client est un élément clé pour le succès des projets. Même dans le cas d’outsourcing ou d’infogérance, il y a des progrès à faire (notamment pour tout ce qui est provisionning).
Au delà des économies de coûts qui pourraient être faites, une SSII n’a tout simplement aucune crédibilité auprès de ses clients et prospects si elle n’est pas elle-même engagée, aussi bien dans une stratégie 2.0 que dans la bascule de son SI en mode SaaS.
Théorie personnelle : comme le SI d’une SSII est réalisé par des gens de ladite SSII, que ceux-ci sont refacturés en interne à un tarif inférieur au tarif que paierait un client, et qu’ils repartent donc prester chez un « vrai » client ASAP, le SI est au final géré en dilettante, du chef de projet au dernier grouillot.
Ajoutons que la direction de ce genre de boîte s’occupe de commercial d’abord et d’informatique ensuite (encore moins de RH), un projet SI sera donc vu comme accessoire.
Le turn-over élevé n’arrange rien.
Oui, moi aussi j’avais reçu une énorme claque en entrant dans une grande SSII où je m’imaginais la formation massive, la doc obsessivement capitalisée, et l’intranet au top des dernières technos. Arf. On est con quand on est jeune…
(Je pourrais ajouter que bosser pour un constructeur d’ordinateurs n’est pas une garantie non plus de matériel correct à disposition : partout les cordonniers sont les plus mal chaussés.)
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c’est tellement vrai tout ça… puissent les gens t’entendre !
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