« Savoir pour agir » dans le management de projet
Dans une des bibles du management de projet, Le guide du corpus des connaissances en management de projet publié par le Project Management Institute, les auteurs rappellent que la gestion de projet doit prendre en considération et enrichir les actifs organisationnels, aussi bien formels qu’informels, de l’entreprise impliquée dans le projet.
Ces “actifs organisationnels” sont généralement l’ensemble des processus existants dans la(les) organisation(s) impliquée(s) dans le projet, ainsi que ses bases de connaissances existantes. Je ne vous donne pas la liste de ce que tout cela comprend, pour ne pas rendre cette note indigeste, mais vous imaginez très bien le gigantisme de cette simple recommandation pour la conduite d’un projet.
Je me demande si ceux qui font de telles méthodologies prennent vraiment leurs responsabilités quand ils lâchent des recommandations comme celle-ci qui dit, en substance, “ayez une connaissance exhaustive de tous les processus de l’entreprise pour mener à bien votre projet”. Il est certain que ces conditions ne seront jamais remplies, alors pourquoi les prodiguer dans une guide méthodologique de la part d’auteurs dont on ne doute pas de leurs compétences et qui sont je le crois de bonne foi ?
C’est qu’il y a toujours une perspective holistique dans ce genre de littérature qui se manifeste par la croyance qu’il existe un lieu panoptique de la connaissance d’une organisation qui permettrait de la saisir dans sa totalité et de manière exhaustive.
Dans la pratique, c’est une très mauvaise approche que de vouloir tout savoir et tout connaître pour pouvoir agir, et celui qui cherche à appliquer ce genre de méthode va à l’abattoir.
[…] Je tente ici de formaliser un avis un peu plus consistant sur la question en essayant d’aller un peu plus loin que les remarques que j’ai pu faire ici ou là. […]
Je ne suis pas sûr que vouloir tout savoir avant d’agir mène à l’abattoir. Je crois plutôt que c’est un mauvais prétexte à l’inaction et à l’étirement sans fin des projets.
Parlant de méthode, Descartes est sans doute de meilleur conseil en ce domaine, quand il compare ce genre de comportement au voyageur égaré dans la forêt qui tourne en rond au lieu de prendre une direction, même douteuse « car, par ce moyen, s’ils ne vont justement où ils le désirent, ils arriveront au moins à la fin quelque part où vraisemblablement ils seront mieux que dans le milieu d’une forêt. Et ainsi les actions de la vie ne souffrant souvent aucun délai, c’est une vérité très certaine que, lorsqu’il n’est pas en notre pouvoir de discerner les plus vraies opinions, nous devons suivre les plus probables »
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