La pollution relationnelle

Nous tendons vers une économie de plus en plus relationnelle. Par « relationnelle » j’entends que chaque chose n’est ce qu’elle est que dans le faisceau des relations qu’elle entretien avec les autres choses. Rien de bien nouveau certes, cela a toujours été ainsi. Mais comme le nombre des relations et des interactions a décuplé depuis un siècle, comme la densité du tissu relationnel s’est singulièrement accrue, c’est la nature même des choses qui en est changée.

je voudrais ici prendre pour exemple la manière dont, dans ce contexte relationnel, les questions de santé publique sont dangereusement négligées par l’état, les institutions et la puissance publique. Notamment parce que, dans cette économie relationnelle, nous devons de plus en plus faire face à des mécanismes de pollution (industriels, financiers, agricoles, etc.) qui sont eux-mêmes relationnels.

Aujourd’hui, avant d’identifier des agents polluants et nocifs pour la santé, il faut évaluer en laboratoire la réalité de la pollution. Pour ce faire, on tente d’isoler l’agent supposé polluant pour démontrer qu’il est dangereux ou non selon que l’on reproduit ou non un symptôme.
Mais, comme nous sommes dans un environnement relationnel et complexe comme un rhizome, il y a un faisceau d’interférence. Or, les mécanismes de détection des pollutions que l’on utilise encore aujourd’hui sont ceux de l’épidémiologie, mécanismes qui ne sont plus adaptés pour les pollutions relationnelles. C’est la position que défend Gilles-Eric Séralini, professeur de biologie moléculaire et président du Conseil scientifique du CRII-GEN .

Pour le dire rapidement, l’épidémiologie cherche à isoler un agent de type bactériologique pour reproduire en laboratoire sa viralité, sa propagation et ses effets. Cette démarche est totalement inadaptée avec les pollutions relationnelles qui se développent dans un faisceau de corrélations pour produire, selon les individus, pléthores de maladies chroniques (asthmes, allergies, maladies nerveuses, maladies immunitaires, problèmes de stérilité,  etc.) jusqu’à des maladies graves comme le cancer ou alzeihmer. L’épidémiologie passe à côté de cette réalité relationnelle où l’on n’a pas une bactérie qui provoque un effet mesurable mais une multitude d’agents qui provoquent une multitudes d’effets.

On comprend pourquoi les industries qui produisent où émettent des agents polluants maintiennent une pression importante sur les institutions publiques pour que les méthodes de détection des produits nocifs ne changent pas et restent fondées sur le principe des études épidémiologiques. En effet, un produit, pour être interdit, doit être en classe 1 de dangerosité d’une étude épidémiologique. C’est la seule condition qui permet à un ministre de signer l’interdiction du produit.

On traite donc les enjeux de pollution relationnelles avec des méthodes d’épidémiologie qui sont par définition faîtes pour des épidémies. Cette incohérence fait la richesse des entreprises polluantes qui corrompent la puissance publique pour qu’elle ne prenne aucune initiative pour adapter sa politique de santé et de prévention.

Pendant ce temps, nous assistons à un génocide administratif par empoisonnement consenti par la puissance publique.

Face à cette incurie – une de plus – de la puissance publique et politique qui se refuse à diffuser et à donner des chiffres qui permettraient de faire des recoupements et de dégager des analyses, face à cette incurie donc, des associations sans moyens jouent la carte d’une économie de la contribution et de la participation, grâce notamment aux technologies relationnelles, afin que la population participe à la constitution de cartographies et de corpus de données pendant que l’administration fait tout ce qu’il faut pour ne pas les fournir et éviter qu’elles ne voient le jour.

Parmi ces associations, il y a l’association Santé Environnement Provence, qui a été fondée par des médecins qui en ont eu assez de voir défiler des patients sans pouvoir les aider en identifiant les causes des maladies, et notamment du cancer. Ces médecins ont commencé par émettre de sérieux doutes sur les messages des institutions de santé, tout comme ils ont su remettre en cause les pratiques médicales courantes qui font qu’à chaque symptôme on donne un médicament au patient sans avoir la moindre idée de l’origine du mal.  L’émission Terre à Terre du 14 Février nous rappelle à ce propos la position inadmissible de l’administration qui continue,  si ce n’est à nier, à minimiser le plus possible l’impact de la pollution environnementale (alimentation, air, eau) sur la santé publique.

Je crois que c’est avec les logiques propres à l’économie relationnelle que l’on peut arriver à des résultats : c’est en organisant une économie de la contribution grâce aux technologies relationnelles et réticulaires que l’on peut,  non pas se substituer à la puissance publique, mais démontrer qu’elle s’est laissée corrompre par les acteurs industriels d’une économie voulant maintenir des rentes de situations qui datent d’un autre âge et qui sont en opposition directe avec ce sur quoi l’état et la puissance publique doit veiller par dessus tout : le bien commun.

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