Traces de pudeur
Quelle est cette gêne que l’on ressent lorsque l’on se sent observé pendant que l’on écrit ?
Cela a commencé avec cette maîtresse d’école qui faisait le tour des tables et regardait par dessus votre épaule et, depuis, cela n’a cessé.
Cette peur d’être jugé avant que la chose ne soit finie, pendant sa gestation, est un sentiment que je crois très partagé.
Sans aller jusqu’à cette gène d’être observé écrivant, beaucoup sont gênés par l’idée que les ébauches, les esquisses et les brouillons puissent être consultés.
Je crois même que c’était Louis Pasteur qui avait donné la consigne de surtout ne permettre à quiconque de consulter ces notes de travail après sa mort (mais peut-être était-ce Pierre Curie, je ne sais plus)
Et pourtant, les brouillons et les cahiers, avec leurs ratures, leurs errances, et avec eux la mise à nue des dispositifs de création et de réflexion employés, sont des traces d’une très grande valeur. Ils ont des vertus pédagogiques indéniables.
(Manuscrit de Victor Hugo)
Même hors du périmètre de l’écriture, la récente mis à nue des ébauches des tableaux de Léonard de Vinci grâce aux rayons X est l’occasion d’une nouvelle approche de l’histoire et de la peinture.
(La Joconde sous RayonsX)
Je ne fais pas allusion à Léonardo par hasard, car chacun sait qu’il prenait ses notes dans une écriture inversée, pour en occulter l’accès à des yeux autres que les siens.
C’est peut-être un peu çà qui se perd dans les supports numériques : l’archéologie de la création. Mais je ne veux pas être réactionnaire sur ce point, car les versions successive et horodatées des fichiers nos disques durs amènent au moins autant de précieuses informations.
si je puis me permettre : gêne (en gras, ça se voit beaucoup)
(commentaire jetable après usage)
[Reply]