Le penseur est un lecteur
Afin de poursuivre la tentative de réponse à la question « pourquoi ne peut-on pas lire sur l’écran », je propose la variation suivante :
Nous ne pouvons pas lire bien longtemps sur un écran d’ordinateur parce que nous sommes en position de regard horizontal. Or, c’est dans cette position que notre regard est soumis à des perspectives d’une grande profondeur, et amplitude, de champ.
Lire à l’horizontal doit provoquer le déséquilibre d’un dispositif qui s’attendait à avoir une profondeur et une amplitude de champ plus importante.
Dans cette position, notre regard ne cesse de vouloir traverser l’écran pour voir au loin, pour s’échapper. C’est ce qui fait que notre attention ne tiens pas la charge très longtemps en position de lecture horizontale.
On dit de quelqu’un qui est dans ses pensées qu’il a le regard absent. Comme si une caméra n’arrivait pas à faire sa mise au point.
Et si ce mouvement oculaire n’était pas simplement la conséquence de l’activité psychique mais une partie même du phénomène. Penser et avoir ces mouvement oculaires, de ces deux termes aucun n’est premier, et aucun n’est la conséquence de l’autre ; ils participent, ils composent.
Il n’y a qu’une position dans laquelle je puisse lire confortablement, c’est dans une position du regard proche de la verticale, où j’ai le regard plongeant sur les pages du livre.
En ce sens, le fameux penseur de Rodin est, à mes yeux, tout autant un lecteur.
Comme si, dans cette oeuvre, la figuration de la pensée prenait la posture du lecteur, pour mieux apparaître.
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